lundi 17 septembre 2012

B comme Blok

Le bloc de l'est


Je me suis éloignée et j'ai pris de la hauteur. Me voilà désormais l'occupante d'un appartement situé au quinzième étage d'un bâtiment qui en compte dix-huit. Je ferai une description détaillée de mon logement dans un prochain billet. Vu de l'extérieur, mon blok est semblable aux centaines d'autres construits dans la capitale sous l'ère socialiste (entendre "communiste".) et à la tour jumelle qui se dresse en face de lui. On distingue de loin ma tour et sa soeur jumelle qui lui fait face car ce sont les plus hautes du quartier ou plutôt du "жилищен комплекс" (toujours abrégé par les initiales Ж.К. et désignant un complexe résidentiel). Mon gratte-ciel (j'aime la poésie de ce mot) semble avoir été construit à la hâte et l'absence de revêtement mural permet de distinguer l'empilement des blocs de béton. Les fils électriques indisciplinés, courent et s'entremêlent sur la façade, les antennes de télévision et les paraboles satellites fleurissent sur les balcons et un oeil attentif distinguera quelques fissures ainsi que des fenêtres en état de délabrement. Mais dans ce pays il ne faut pas se fier aux apparences des infrastructures mais s'intéresser à leur beauté intérieure.

Au pied de mon blok sont stationnées plusieurs voitures, certaines témoins d'une époque révolue et que je n'avais eu l'occasion de voir qu'en photo dans des ouvrages consacrés aux voitures de collection. L'entrée du bâtiment est gardée par les chiens qui ont élu domicile au pied des marches. Ils sont vieillissants, pacifiques et bien portants, je soupçonne donc le concierge de leur donner à manger très régulièrement. Ma jeune et jolie collègue soulignait justement que le problème des chiens errants en Bulgarie résidait dans le fait que les gens ne peuvent s'empêcher de les nourrir, ce qui n'aide pas à freiner leur reproduction ou plutôt leur invasion devrais-je dire, à la vue des dizaines de milliers d'animaux sans colliers qui peuplent la capitale. 




Illustration: Le quartier de Lagera vu du Boulevard Tsar Boris III.
Source: Photographie personnelle.

L'accès au bloc est surtout surveillé 24 heures sur 24 par le concierge, ou plutôt les concierges, puisqu'ils sont au nombre de trois et se relaient selon le système des trois-huit. Leur présence est vraiment rassurante pour la petite française vivant seule que je suis. J'ai mis plusieurs jours à les distinguer car ce sont tous trois des papis septuagénaires (à vue d'oeil).  Je devine qu'il s'agit de retraités qui, avec ce petit boulot, cherchent à arrondir leurs fins de mois, mais mes rudiments de bulgare ne me permettent pas encore de leur poser la question. Je discute volontiers avec eux, car ils sont souriants et me saluent toujours quand je pars tôt le matin les yeux encore collés ou quand je rentre du travail l'air abattu. Ils s'appliquent à répéter leurs injonctions, à y associer des gestes et à corriger ma prononciation afin de m'aider dans mon difficile (mais loin d'être fastidieux) apprentissage de leur langue. Ils veillent au grain, guettant mes pas afin de m'ouvrir la porte, d'appeler l'ascenseur ou même de m'aider à porter mes sacs de course. Deux de mes nouvelles amies, venues me rendre visite le deuxième weekend, ont gardé un très bon souvenir de cet accueil et ont même photographié l'un d'entre eux !

Je ne peux pas terminer cet article sans dire un mot de l'ascenseur. J'essaie de me rassurer en me répétant que malgré tout il fonctionne et qu'un technicien doit être chargé d'en vérifier l'état de marche régulièrement. Mais j'ai toujours la boule au ventre à chaque fois que je le prends. Deux choix s'offrent à moi (une alternative plus sûre serait d'emprunter les escaliers, mais je ne suis pas assez sportive, courageuse ou plutôt masochiste pour descendre quinze étages à pied): un ascenseur sans porte automatique (c'est-à-dire qu'il faut l'attraper au passage et veiller à pousser la porte au bon moment sinon il repart dans l'autre sens, et surtout avec celui-ci je vois défiler les étages sous mes yeux) mais avec musique d'ambiance, ou un ascenseur sans la radio mais avec une porte automatique qui laisse le temps de pénétrer à l'intérieur et d'en sortir sans précipitation. Dans les deux cas, je ne peux m'empêcher de vérifier que le sol est bien présent (j'ai ici un doute au sujet de la concordance des temps: mode indicatif ou subjonctif?), de peur d'envoyer le pied dans le vide dans l'éventualité où la cage se serait arrêtée à mi-palier. Et enfin, on m'a conseillé de ne pas jouer avec mes clés car celles-ci pourraient tomber dans le vide, me laissant à la rue, devant une porte close et mon seul abri serait justement ce maudit ascenseur !

2 commentaires:

  1. Parfois ici dans les ZUP on distingue aussi les appartements préfabriqués empilés mais j'imagine que c'est différent pour toi vu la description que tu en fais.
    Merci pour la photo ! J'adorerai ces vieilles voitures !
    Attention aux chiens, ils restent imprévisibles.
    En revanche, c'est chouette si même les concierges t'aident à améliorer ton bulgare.
    Un escalier se descend plus facilement que ce qu'il se monte, non ? Ici aussi je vérifie que le sol est bien présent je te rassure !
    Aussi, ne fait pas le moindre saut dans l'ascenseur !

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  2. Les cages d'escaliers sont rarement empruntés donc leur état et leur propreté laissent à désirer

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